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Il y a quelques jours, nous sommes partis à la rencontre de Cathy Immelen, ancienne étudiante de la HEPL et aujourd’hui journaliste, afin de retracer son parcours. Elle nous a ouvert les portes de la RTBF où elle travaille depuis sa sortie de l’école.

Pourquoi avez-vous décidé d’entreprendre des études en communication ?

Pendant de nombreuses années, en secondaire je ne savais pas quoi faire parce que j’aimais bien tout. J’ai voulu faire tourisme, professeur d’anglais puis médecine et ensuite traductrice… Avec tout cela, je me suis demandé : « qu’est-ce que tu aimes faire d’autre ? ». Je me suis rendu compte que j’adorais faire des exposés, des travaux. J’aimais cette idée de choisir un sujet, amasser plein d’infos et en retirer la substantifique moelle. Au fond, est-ce que ce n’est pas ça le travail de journaliste ? C’est s’intéresser à plein de choses et puis tenter de faire comprendre, de faire passer un message.

Pourquoi avoir choisi l’école supérieure avant l’université ?

J’étais dans une école de filles en secondaire. Je me sentais beaucoup trop jeune, naïve et effrayée pour aller à l’université. Je sortais d’une petite école où l’on faisait la prière, où l’on était 12 par classe. J’avais peur de me retrouver dans un amphi. Comme j’étais animatrice dans un camp pour enfants, j’ai rencontré une fille qui m’a dit : « moi, je fais mes études dans une école qui s’appelle ISIS (NDLR, ancien nom de la HEPL), c’est super ! ». Elle me l’a tellement bien vendu que je suis dit que j’allais tenter l’ISIS. Je savais aussi qu’il y avait beaucoup de stages à la Haute École. Je voulais tester pour savoir si c’était ma voie, là où à l’université tu as juste un mois de stage en troisième année.

Où avez-vous réalisé vos stages pendant vos trois années d’études ?

J’ai fait mon premier stage à Radio Contact. Tout de suite, je faisais des billets, des interviews. J’ai directement travaillé pour Radio Contact, j’avais 18 ans. L’année suivante, j’ai effectué un stage à la RTBF au service de Guy Lemaire. Là, j’ai eu un contrat, en 1999. Ensuite, je n’ai pas quitté la RTBF depuis. Je ne sais pas ce qu’est le chômage (rires). J’étais à mi-temps à la RTBF en continuant mes études à l’ISIS en même temps. J’ai continué mes études à l’université après. En troisième année, j’ai fait un stage aux Niouzz, le JT pour enfants. J’ai eu une proposition de contrat mais cette année-là, la RTBF a changé de statut au niveau législatif et il fallait un diplôme universitaire pour être journaliste, ce qui est toujours le cas d’ailleurs. Sous promesse de faire mes trois ans d’université, j’avais le contrat. Donc si je travaille à la RTBF c’est grâce à l’ISIS et grâce aux stages !

Avez-vous gardé des contacts avec d’autres étudiants en communication ?

Plus du tout. J’ai gardé quelques contacts sur Facebook mais mes études n’ont pas été des années amicalement très riches pour moi parce que je travaillais beaucoup. Mes potes étaient mes nouveaux collègues du bureau.

Quels étaient vos cours préférés et détestés ?

Je détestais Comptabilité (rires). J’aime tout ce qui est littéraire donc pas vraiment les chiffres… J’aimais bien CSTI (Communication scientifique, technique et industrielle) parce qu’on faisait des exposés. J’aimais tous les cours qui étaient axés sur la pratique. Ce qui était déstabilisant c’est que ce que j’ai appris en haute école, j’ai appris tout le contraire à l’université. Il y avait quelques cours inutiles comme celui qui nous apprenait à chercher de l’info sur internet. J’avais l’impression d’en connaitre plus que le prof, il doit être sans doute pensionné maintenant (rires). J’ai adoré les cours de Cinéma et de Sémiologie.

Vous présentiez le programme de la RTBF, « Pop M ». Quel était votre rôle dans cette émission ?

Le programme s’est arrêté il y a quelques jours. Je n’étais pas à la tête de cette émission, je ne suis pas la rédactrice en chef. Quand j’arrive sur le plateau, mes textes sont écrits et je n’ai pas vu les sujets. Je travaille trois heures sur une émission. Je lis les textes et puis c’est fini. Le gros du travail, c’est lorsque tu es rédacteur en chef d’une émission, comme je l’étais sur Tellement ciné, où tu diriges l’équipe, où tu as une page blanche et il faut créer 25 minutes d’émission. J’ai accepté de présenter l’émission car je travaillais déjà six jours sur sept et donc j’ai bien voulu y participer à condition d’être juste la présentatrice.

Comment résumeriez-vous votre rôle et votre travail au sein de la RTBF aujourd’hui ?

Je fais des chroniques cinéma pour Pure, je travaille sur Vivacité où je fais aussi des chroniques cinéma. Je travaille pour La Première dans Le Mug où je fais des chroniques cinéma très approfondies que j’adore. Je développe un sujet d’actu, ça me demande deux jours de préparation et de recherche. Je vois les films en projection presse, tout ce qui sort en salle. Par exemple, aujourd’hui, j’ai vu deux films. Je fais des interviews. Pour le moment, je monte dans mon bureau celle de Michel Blanc que j’ai réalisée il y a trois semaines. En résumé, c’est du visionnage de films, de l’écriture de chroniques, de l’enregistrement et du montage d’interviews. Je suis journaliste cinéma.

Mon interview de Marion Cotillard a tourné dans les bêtisiers du monde entier !

Pouvez-vous nous raconter une expérience insolite que vous avez vécue dans le monde de la communication durant vos études ou dans votre travail ?

En 20 ans, il y a tellement de souvenirs. Je dois dire qu’il y a tout de même un moment qui me poursuit, un peu malgré moi, c’est mon interview de Marion Cotillard. La vidéo est passée dans plein de bêtisiers du monde entier, elle est toujours sur internet d’ailleurs. En fait, elle est horrible avec moi, elle me nie. Dès qu’on lui dit : « ça tourne ! », poker face, elle devient super sympa, elle me sourit. Quand on lui dit : « coupé », alors que ça tourne toujours, je lui tends la main pour lui dire au revoir, elle tourne la tête et me nie. C’est vraiment Marion Cotillard undercover. C’était il y a dix ans je crois. Depuis, énormément de personnes m’arrêtent en rue pour me dire : « depuis vous, on ne l’aime plus Marion Cotillard ! ». C’est bizarre que ça me poursuive.

Avez-vous eu d’autres expériences comme celles-ci par la suite ?

J’aime bien lier ce souvenir-là à un autre. Je suis allé à Chicago pour le film Public Enemies et faire des interviews de Marion Cotillard et de Johnny Depp juste après. Je me suis dit : « ces gens sont horribles, elle m’a traitée comme une merde, qu’est-ce que je fais à Chicago ? J’en ai marre, quel métier nul ! ». D’habitude, j’ai un bon contact avec les gens, même les grandes stars, j’arrive à les mettre à l’aise. Maisje devais rencontrer Johnny Depp juste après Marion Cotillard donc j’avais vraiment peur qu’il se foute de moi. Finalement, lui a été adorable, il m’a pris les mains pendant l’interview… C’est là que je me suis rendu compte que, en fait, j’aime bien ce métier ! J’ai beaucoup de souvenirs, j’ai couvert 15 festivals de Cannes.

Que voudriez-vous changer ou modifier au monde de la com d’aujourd’hui ?

Cela va des réseaux sociaux aux attachés de presse en passant par nous. Par exemple, sur les réseaux sociaux, il y a beaucoup de choses qui m’énervent. Je suis sur Twitter, en général j’utilise mon compte surtout pour aller chercher de l’info mais quand je vois des gens qui se font mousser eux-mêmes à travers des problèmes qui touchent d’autres personnes… ça, ça me rend malade. Je ne supporte pas les gens qui se sentent obligés de donner leur avis alors qu’on ne leur a pas demandé.

Il y a de la parano surtout chez Disney. Nous, les journalistes, on ne va pas pirater ou enregistrer un film !

Voudriez-vous changer quelque chose pour être plus à l’aise dans votre travail d’aujourd’hui ?

L’idéal serait que les distributeurs de films ne nous préviennent pas en dernière minute lorsqu’ils montrent un film et qu’on change nos horaires. Par exemple, Star Wars est montré le 17 décembre à 12h et il sort le 18 décembre, le lendemain et on ne peut pas sortir nos critiques avant 9h, on a un embargo. Mes chroniques sont à 8h45 et 8h54 donc dans ce cas-là, je ne sais pas du tout quoi faire ! J’aimerais qu’on arrête cette parano dans le milieu de la communication du cinéma. Ce n’est pas parce que l’on sort une critique que ça va influencer le monde entier. En plus, Star Wars les gens n’en ont rien à foutre que j’aime bien ou pas ! Je n’apprécie pas trop cette culture d’embargo, on doit donner nos téléphones à l’entrée des salles, par exemple. Il y a de la parano surtout chez Disney. Nous, les journalistes, on ne va pas pirater ou enregistrer un film !

Quel est le communicant qui vous inspire le plus ?

Il y a un journaliste français qui est très efficace sur les réseaux sociaux. Il s’appelle Mehdi Omaïs. Il est surtout connu sur Twitter, il vient de se mettre sur Instagram. Ce mec fait ce que dans l’absolu j’aimerais bien faire en termes de stories, pas en termes de publications. Il est journaliste et surtout très actif sur Twitter. Il poste toujours la première bande annonce, les premières infos sur les castings… Il lance aussi des débats très intéressants ! Si j’avais plus de temps à consacrer sur les réseaux sociaux, j’aimerais arriver au même contenu que lui.

En communication, il est important d’avoir un bon carnet d’adresses. Pouvez-vous nous expliquer une de vos meilleures rencontres ?

Je n’ai pas vraiment un bon carnet d’adresses, ce qui est souvent le cas pour les journalistes cinéma parce qu’on fonctionne toujours via les attachés de presse. Je n’ai le numéro privé de personne mis à part quelques acteurs ou actrices parce qu’on parle de temps en temps sur les réseaux sociaux. On sait à qui s’adresser pour être en contact avec les artistes mais ils ne sont généralement pas joignables directement. Par exemple, Benoit Poelvoorde change de numéro de téléphone tous les deux mois car il ne décroche jamais et on l’emmerde tout le temps. Pour ce qui est des rencontres, j’ai envie de citer David Cronenberg parce qu’il m’a donné une petite leçon de philosophie pendant 30 minutes. C’était assez formidable.

Voyez-vous une différence entre les jeunes acteurs et les plus anciens ?

Ce sont souvent les plus grandes stars qui sont les plus cool à interview. Par exemple, Robert De Niro, on a l’impression que c’est un vieux papy qui va aller promener son chien juste après. Les gens qui n’ont plus rien à prouver sont vraiment très cool. Que les starlettes, qui démarrent une carrière, sont souvent plus froides. Les filles sont généralement plus froides face à une autre femme et les mecs se la pètent un peu. Les gens bien installés (Bruce Willis, Harrison Ford…) n’ont plus rien à prouver, ils s’en foutent un peu de leur image. Ils ne surveillent pas tout le temps s’ils sont bien assis, s’ils ne vont pas dire une connerie. Ils sont beaucoup plus libres donc les vieux (Catherine Deneuve) c’est bien (rires) !

Ce qui est étrange depuis que je passe à la radio et la télévision, c’est que les gens ont un apriori sur moi avant de me rencontrer.

Depuis que vous passez à la radio et télévision, avez-vous remarqué un changement dans le regard des gens ?

Il y a beaucoup plus de positif que de négatif. Ce qui étrange, c’est que les gens ont un apriori sur moi avant de me rencontrer. C’est chouette que les personnes généralement réagissent bien en étant surpris et en me disant qu’ils m’aiment bien. C’est cool d’être abordé comme cela. Il y a aussi des personnes qui se disent que je dois me la raconter sous prétexte que je fais de la télé. Chaque personne a une image construite de ce que je renvoie dans les médias, pourtant ce n’est pas moi en vrai. On me réduit souvent à une chose en particulier, on me caricature.

Avez-vous vécu de mauvaises expériences avec des personnes que vous ne connaissiez pas ?

Ce qui m’agace le plus, ce sont les commentaires sur le physique que les gens se permettent d’émettre. J’ai déjà eu des remarques de personnes qui m’arrêtent dans la rue en me disant : « c’était bien hier, mais la coiffure ça n’allait pas du tout ! ». Est-ce que je vais dire ça aux gens que je ne connais pas ? Je pense que les filles reçoivent plus souvent ce genre de commentaires : « tu as grossi », « tu as maigri », « il faut manger un peu » … ça me met terriblement mal à l’aise !

Comment avez-vous réagi face à ce changement de considération des gens ?

Je me suis fort renfermée. Il y a beaucoup de gens de l’école que je ne vois plus car du jour au lendemain, quand j’ai commencé à faire de la télé, je n’étais plus Cathy, la pote avec qui on mange des spaghettis et on passe du bon temps. Je n’arrivais plus à avoir des discussions banales avec mes amis. J’étais différente dans le regard des autres. Ce n’est pas très chouette à vivre. Je l’ai un peu mal vécu. C’est très fatigant. Depuis, je sors beaucoup plus avec des personnes du milieu.

Il y a beaucoup de points positifs dans votre métier mais il faut aussi prendre en compte les points négatifs…

Oui, il y a de la jalousie. Il y a des personnes sur les réseaux sociaux qui vont dire : « même pour la violer, j’en voudrais pas » ou « si je la croise, je la brûle » … Moi j’ai lu des commentaires comme cela mais c’est à ma mère que ça fait beaucoup de peine quand elle les lit. J’ai appris à ne faire attention ni aux critiques positives, ni aux critiques négatives. Pour moi, ce n’est pas crédible si les gens m’adorent ou me détestent alors qu’ils ne me connaissent pas. La vérité est sans doute au milieu.

Avez-vous des futurs projets professionnels ?

J’ai peut-être un futur projet pour septembre 2020 mais je ne suis même pas censé le savoir (rires). Généralement lorsque l’on me propose de présenter une émission, tout le concept est déjà créé comme « Pop M ! ». Je sais que des personnes ont écrit un projet avec mon nom et que l’on va me le proposer. Ce sont des bruits de couloirs mais en même temps les personnes qui ont écrit pour moi me l’ont révélé. De toute façon, j’avais deviné. Mais je ne peux rien dire (rires) ! De janvier à juin, je couvre toujours le festival de Cannes. Je m’occupe du cinéma mais je tangue un peu vers les séries maintenant car les deux sont un peu devenus indissociables.

Quels conseils donneriez-vous aux (futurs) étudiants en communication ?

Choisissez extrêmement bien vos stages. C’est le moyen numéro un pour avoir du travail après. S’il y en a bien un qui peut déboucher à un contrat, c’est celui de troisième année. Il faut toujours garder un pied dedans, même s’il s’agit de travailler bénévolement au début. Vous êtes trop nombreux à sortir des écoles donc le seul moyen est de se faire remarquer !

Claire Kupper, Camille Kransvelt et Olivier Desmet, Bloc 3 – orientation Arts

Post Author: comuniquehepl

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